Enza, en train de démontrer la formation à l’orientation et à la mobilité qu’elle a reçue de Marie-Hélène.
À l’adolescence, je rêvais de devenir une artiste. J’adorais peindre, dessiner et créer avec de la couleur. L’art était ma passion, et j’aimais tout particulièrement l’œuvre de la peintre mexicaine Frida Kahlo. Mais alors que je poursuivais ce rêve, ma vision a commencé à décliner. J’ai subi plusieurs interventions chirurgicales pour des décollements de rétine dans les deux yeux, et pendant un certain temps, il semblait que tout allait bien. Puis, 15 ans plus tard, cela s’est produit à nouveau—mais cette fois, les dommages étaient permanents. J’ai perdu complètement la vue dans mon œil droit et n’ai conservé qu’une vision partielle dans mon œil gauche.
Mon univers a alors complètement basculé. Tout à coup, je me trompais sur les distances, je fonçais dans les murs et je trébuchais dans les escaliers. Plutôt que de montrer ma frustration, je la masquais par l’humour. Chaque fois que je heurtais quelque chose, je disais à la blague : « Voilà ma prochaine acrobatie ! » C’était ma façon de composer avec la situation.
Au travail, les choses se sont également compliquées. Mon emploi à l’Université Concordia m’obligeait à me déplacer rapidement d’une réunion à l’autre en tentant de suivre le rythme. La lecture m’épuisait. J’emportais des dossiers à la maison parce que je n’arrivais pas à rester à jour avec mon travail sur ordinateur pendant la journée. J’ai trouvé des astuces—mémoriser les diapositives d’une présentation PowerPoint que je ne pouvais pas voir, ou garder mes distances avec mes collègues pour éviter de me cogner contre eux. Je pensais pouvoir continuer à faire semblant, à cacher mes difficultés.
J’étais habituée à être forte, active et indépendante. Maintenant, toutefois, je ne faisais que faire bonne figure et je tenais à peine le coup.
Un collègue m’a suggéré de visiter le Centre d’accès de l’université, une ressource pour les étudiants et le personnel en situation de handicap. C’est ainsi que j’ai découvert le Centre MAB-Mackay. Même si ce n’était qu’à quelques pas de mon lieu de travail, cela représentait une grande étape pour moi.
Peu après mon appel, une spécialiste en réadaptation est venue me rencontrer à mon bureau pour m’offrir du soutien. Elle était gentille, compréhensive et patiente. Sans jamais insister, elle m’a simplement fait savoir quelles aides étaient disponibles.
Puis, un matin, alors que je travaillais à distance depuis chez moi, j’ai découvert que je ne pouvais plus du tout voir mon écran d’ordinateur. Mon œil gauche faiblissait, tout comme l’avait fait mon œil droit auparavant. J’ai aussi eu quelques accidents en marchant dehors parce que je ne voyais pas les feux de circulation. J’ai commencé à avoir peur de quitter ma maison.
Mon univers rétrécissait de plus en plus, et un sentiment d’appréhension et d’isolement commençait à m’envahir. C’est alors que j’ai compris que je ne pouvais plus « faire semblant ».
J’avais besoin d’aide. J’avais atteint mes limites.
Des spécialistes du MAB-Mackay sont venus chez moi et m’ont montré comment quelques petits ajustements pouvaient rendre mon quotidien plus facile. Ils m’ont initiée à la technologie adaptée pour que je puisse recommencer à lire, et m’ont aidée à apporter des modifications pour rendre mon domicile plus sécuritaire.
J’ai aussi travaillé avec plusieurs spécialistes en mobilité, qui m’ont appris à me déplacer avec confiance, tant chez moi qu’au travail. J’ai appris à couper des aliments en toute sécurité, à faire la lessive, et même à vider le lave-vaisselle sans encombre.
Ils m’ont dit qu’un jour, quand je me sentirais prête, on me montrerait à utiliser une canne blanche pour marcher de nouveau en toute sécurité dans mon quartier. Avec le temps, j’ai pris mon courage à deux mains. J’étais nerveuse au début, mais on m’a enseigné des techniques qui ont changé ma vie—balayer les surfaces avec ma canne, écouter les sons de la circulation, naviguer mon environnement avec confiance.
Chaque spécialiste m’a offert un soutien inestimable qui m’a permis de retrouver ma confiance.
Peu à peu, j’ai commencé à voir les choses autrement. J’ai cessé de me concentrer sur ce que j’avais perdu, et j’ai commencé à voir ce qui était encore possible. J’ai trouvé de nouvelles façons de faire ce que j’aimais. J’ai retrouvé l’autonomie que je pensais avoir perdue. Et surtout, j’ai compris que je n’avais pas à affronter cela seule.
Le MAB-Mackay ne m’a pas seulement aidée à m’en sortir. Il m’a aidée à revivre.
Grâce aux nombreuses compétences que j’ai acquises, j’ai pu poursuivre ma carrière jusqu’à ma retraite, en partant selon mes propres termes. Aujourd’hui, j’accueille cette nouvelle étape avec sérénité, sachant que j’ai les outils et le soutien pour affronter l’avenir en toute confiance.
Je suis infiniment reconnaissante pour tout ce que j’ai appris et pour la communauté qui m’a accompagnée à chaque étape de mon parcours.